Notre-Dame de Jouarre

lundi 29 mai 2017


Pèlerinage à Notre-Dame de Jouarre
le lundi de Pentecôte 5 juin 2017



Jouarre, sur le plateau de Brie, au confluent des vallées de la Marne et du Petit Morin, à 70 kms de Paris, possède une abbaye particulièrement ancienne, remontant à l’époque mérovingienne. Au 7e siècle, saint Colomban, moine irlandais, venant d’Irlande et Italie, s’arrêta, vers 610,à Ussy-sur-Marne chez Authaire, chancelier de Dagobert 1er et riche propriétaire terrien. Il bénit les trois fils de la maison, qui fondèrent chacun un monastère dans la région : Adon à Jouarre en 630, Dadon, futur saint Ouen évêque de Rouen, à Rebais et Radon à Reuil en Brie. Les abbayes de Rebais et Reuil disparurent durant la révolution de 1789. En revanche, l’abbaye de Jouarre ne fut pas entièrement détruite et réussit à renaître.

C’est ainsi que les visiteurs et pèlerins peuvent encore venir admirer la crypte mérovingienne, construite au VIIe siècle, avec son mur mérovingien dit « réticulé », constitué de rectangles et de losanges, taillés régulièrement et formant comme un damier décoratif, à l’instar des murs des maisons romaines cossues. La crypte possède deux rangées de colonnes de marbre antique surmontées de chapiteaux en marbre blanc des Pyrénées. On peut y admirer le tombeau de l’abbesse Telchilde, première abbesse du monastère, vénérée pour la sainteté de sa vie, ainsi que le tombeau de sainte Aguilberte, deuxième abbesse de Jouarre, qui était la cousine de Telchilde.

La crypte abrite également le gisant de sainte Osanne, princesse Écossaise ou Irlandaise du VIIe siècle, tenant le livre de l’Évangile.

Surtout, elle recèlerait la plus ancienne reproduction connue du Christ Tétramorphe en Occident. Le Christ y apparaît dans une mandorle, tenant le livre des Écritures, entouré des quatre évangélistes.

Le monastère a traversé l’histoire, ses drames et ses soubresauts, les temps de persécution, si nombreux, avec de remarquables abbesses à sa tête. Il a été en effet dirigé par des abbesses, généralement de très haute valeur spirituelle et dotées d’un courage et d’une grandeur d’âme remarquables. Il demeure aujourd’hui bien vivant, avec sa communauté de moniales.

Des pèlerinages sont attestés en ce haut-lieu spirituel dès le 10e siècle, avec la première mention du pèlerinage des Saintes Reliques, pour implorer la miséricorde du Seigneur.

C’est ce pèlerinage qui demeure aujourd’hui, chaque année, le lundi de Pentecôte.

Programme

9h Découverte des cryptes mérovingiennes

9h30 Louanges

10h Départ de la marche et animation spirituelle pour les personnes à mobilité réduite

11h Station à l’hôpital de Jouarre

11h30 Eucharistie dans l’église de l’abbaye

12h30 Repas tiré du sac dans les jardins de l’abbaye

14h15 Projection-méditation du vitrail de Noé de la cathédrale de Chartres

16h Confessions possibles à l’abbaye

16h30 Vêpres et envoi en mission

Une histoire mouvementée sous la direction de grandes abbesses

« L’abbaye dès le VIIe siècle a une grande vitalité spirituelle et fonde à Soissons et à Chelles.

Nous savons peu de choses des 8e et 9e siècles. Les annales gardent la trace des activités caritatives de l’abbesse Ermentrude, vers 840. Elle organise la culture des terres sur le plateau, suscite la création du premier hospice pour soigner les lépreux, la « maladrerie », un asile pour les pauvres, la « pitancerie », et même un accueil pour les truands, la « trumanderie ».

L’abbaye vit également une époque de prospérité spirituelle.

Pour maintenir les abbayes sous sa gouverne, Charlemagne impose la Règle de Saint Benoît dans tout son empire. Jouarre, qui suivait une Règle mixte entre celles de Colomban et de Benoît, s’aligne immédiatement. En 847 des reliques de saints sont offertes à l’abbaye, elles sont enveloppées dans des tissus précieux venus d’Orient. Les reliques drainent les pèlerins qui viennent vénérer les saints.

Mais l’abbaye est ravagée par les Normands, ces fameux Vikings qui remontent la Marne en 888. Les moniales s’exilent en Bourgogne. Le monastère est relevé au 10e siècle et connaît une période de grande vitalité.

L’insécurité des temps amène le Bourg de Jouarre à fortifier ses murs et à s’entourer d’une enceinte. A la fin du 11e siècle est élevée La Tour, d’abord clocher de l’église carolingienne, puis tour de guet et poste de défense pour les populations alentour. Cette Tour sera arasée d’un demi-étage au lendemain de la Révolution.

Au 12e siècle, Jouarre se constitue peu à peu en véritable seigneurie ecclésiastique et en vraie puissance féodale. L’abbaye protège son scriptorium. Un évangéliaire témoigne de l’art des copistes. Les abbesses ont droit de juridiction sur le temporel comme sur le spirituel. Elles font tenir foires et marchés, elles rendent la justice et nomment les curés.

En 1131 le pape Innocent II, mandé par saint Bernard, s’arrête à l’abbaye pour régler un litige ecclésiastique et il y convoque un Concile l’année suivante. Des différends surgissent avec l’évêque de Meaux au sujet de l’exemption, ce privilège qui permet d’échapper tant au pouvoir spirituel de l’évêque qu’au versement des bénéfices à l’évêché. L’abbaye obtiendra la reconnaissance de son exemption en 1225. Désormais elle dépend canoniquement directement du Saint Siège, ce privilège durera 450 ans.

La prospérité est anéantie en un temps record par la Guerre de Cent Ans (1337-1453). A Jouarre monastère, église et village sont pillés et incendiés, les sœurs sont contraintes à l’exil. Elles reviennent en 1433, la remise en état des bâtiments et domaines demandera plus d’un demi-siècle. La population est appauvrie et l’abbesse Jeanne d’Ailly redistribue vers 1470 des terres abandonnées : voilà l’origine des « Usages » à Vanry et ailleurs.

Le 16e siècle c’est la Renaissance. En 1514, l’abbesse Antoinette de Moustier fait sculpter et placer dans le vestibule de la Tour une Mise au Tombeau de Michel Colombe, dont les principaux personnages subsistent, exposés depuis la Révolution à l’église paroissiale.

Une figure domine cette période, le roi François Ier (1494-1547), qui pose les bases de l’absolutisme et centralise l’Etat. Depuis le Concordat de 1515, c’est le roi qui nomme les abbés et abbesses. A Jouarre, François Ier nomme sa sœur naturelle, Magdeleine d’Orléans. Cette nouvelle abbesse introduit la réforme de Fontevrault et reconstruit les bâtiments conventuels. Entre 1525 et 1543 les voûtes de la Tour sont restaurées et décorées à ses armoiries. Elle ordonne la fabrication des châsses de bois doré destinées à contenir les reliques des saints. Pendant le conflit entre François Ier et Charles Quint, Empereur du Saint Empire Romain-Germanique, les religieuses doivent s’exiler en 1544. Triste époque, la deuxième moitié du siècle est déchirée par huit guerres de religion consécutives, entre 1562 et 1598.

La famille de Bourbon donne à l’abbaye trois abbesses successives. La première, Charlotte, arrive à l’abbaye à 14 jours… Agée de 14 ans et contrainte par sa famille elle fait profession et devient abbesse. Des vœux prononcés sous la contrainte sont nuls et Charlotte, majeure en 1572, s’enfuit, passe au protestantisme et épouse Guillaume d’Orange. Ses deux sœurs, Louise et Jehanne de Bourbon, choisissent librement la vie monastique et l’abbatiat. Elles gouvernent de 1572 à 1624 et font entrer l’abbaye dans le mouvement de réforme, de ferveur et de renaissance spirituelle à l’aube du 17e siècle. C’est l’époque de Marie de Beauvilliers à Montmartre, de Marguerite d’Arbouze au Val de Grâce et de Françoise de La Châtre à Faremoutiers.

Au siècle suivant, l’abbesse Jehanne de Lorraine continue l’œuvre de réforme. A l’abbaye 120 moniales vivent un vrai retour aux observances traditionnelles : pauvreté, vie commune dans le coucher, la nourriture et le travail, vie de prière et de silence. Ce siècle a le goût des constructions grandioses. Jehanne fait abattre l’église romane à flèche de pierre pour bâtir une église somptueuse, tant par la taille que par les matériaux employés : marbre, jaspe et bronze doré. En 1627, en présence de la Reine Marie de Médicis, elle fait relever de la Crypte les restes des corps des saints, pour les placer dans des châsses conservées alors dans l’abbatiale, actuellement à l’église paroissiale. On organise des processions derrière ces châsses lors de calamités publiques, pour solliciter du Ciel paix, santé et prospérité.

Les troubles reviennent avec la Fronde (1648-1653) qui oblige la Communauté à de nouveaux exils. Henriette de Lorraine, nièce de Jehanne, entre dans l’histoire hélas non pour sa ferveur mais pour son manque d’humilité. Elle a des démêlés orageux avec

Bossuet, évêque de Meaux, au sujet de l’exemption du monastère. Procès retentissant où est finalement aliéné le droit de juridiction de l’abbesse sur le territoire de Jouarre, le clergé et le peuple, qui était resté incontesté depuis 1225.
Lorsque l’abbesse se retire, vaincue, Bossuet se montre père spirituel de grande envergure ; en témoigne la correspondance suivie avec les moniales. En 1695, il écrit : « Dieu aime Jouarre, et les relations qu’on y contracte ont le caractère de l’éternité ».

Le début du 18e siècle est une époque de stabilité, sous le sage abbatiat de trois abbesses de la famille de Rohan, qui gouvernent près d’un demi-siècle.

Le dernier abbatiat avant la Révolution est celui de Madame Catherine-Henriette de Montmorin, durant 53 ans. On lui doit d’importantes constructions de bâtiments, qui forment aujourd’hui la majeure partie des bâtiments conventuels. Elle meurt en 1792, très âgée, la veille de la dispersion des cinquante-huit religieuses de la communauté.

Dès 1790, les terres de l’abbaye avaient été confisquées par le Comité révolutionnaire.

On trace des rues dans les jardins pour desservir les logements nouvellement créés : la rue Montmorin coupant le corps de bâtiments du 18e siècle témoigne de cette évolution. L’église sert de carrière de pierres, entre autres pour construire le pont sur la Marne, à la Ferté sous Jouarre. Le cloître et le chapitre sont détruits.

Pour les préserver des dégradations, la population transporte à l’église paroissiale cloches, châsses et statues. A Jouarre, on ne trouve nulle hostilité envers la religion et la communauté, au contraire, vingt-huit sœurs peuvent demeurer dans le village et se réunir à l’église paroissiale pour célébrer les offices.

Dès 1821 les survivantes rachètent le Pavillon abbatial et y installent un petit pensionnat. Soutenues par Monsieur Villecourt, vicaire épiscopal de Meaux, elles adressent une requête à Madame de Bavoz, fondatrice et première abbesse de Pradines (Loire) en vue d’une Restauration. Mélanie Gilquin, jeune fille de La Ferté sous Jouarre, entre au noviciat de Pradines dans l’espoir d’une renaissance de Jouarre.

En 1837 cinq religieuses bien âgées, les dernières de la communauté dispersée en 1792, accueillent onze moniales de Pradines. Elles sont rapidement rejointes par des moniales de différents monastères réfugiées à Meaux. Madame Sainte Symphorose Bagot est la première abbesse de l’abbaye restaurée. Madame Athanase Gilquin, la fameuse Mélanie, lui succède.

Au prix de grands efforts, la communauté rachète progressivement les bâtiments et reconstruit l’église en 1863. Partout la vie monastique refleurit. L’abbaye est en lien avec Solesmes, d’abord avec Dom Guéranger puis la jeune Cécile Bruyère, fondatrice des moniales, vient quelques temps à Jouarre. D’autres liens s’établissent avec le Père Muard, fondateur de La Pierre qui Vire. Une élève du pensionnat, Marie Cronier, fonde un monastère à En-Calcat.

Sous l’abbatiat de Madame Benoît Bernier, le 20e siècle débute par la loi de séparation de l’église et de l’état en 1901, et en 1903, la communauté repart pour 16 ans d’exil en Belgique, puis aux Pays-Bas, où elle est décimée par la maladie et les carences alimentaires.

Durant la Première Guerre mondiale, les bâtiments deviennent hôpital militaire et quatre religieuses, quittant l’exil, sont envoyées pour soignent les blessés.
La fin de la guerre est temps de la réconciliation et la communauté revient en 1919, augmentée de quelques sœurs hollandaises. Avec courage et foi elles réparent et construisent. En 1921, Jouarre accueille Madame Bénédicte Delmas qui, après avoir reçu sa formation monastique, fonde les bénédictines missionnaires de Vanves. En 1933, pour relever le titre de l’abbaye de Soissons l’abbaye fonde le prieuré d’Oulchy le Château, devenu plus tard l’abbaye de Venière (Saône et Loire).

En 1940, pendant la Seconde Guerre mondiale, nouvel et bref exode, pendant que le monastère est occupé.

Deux fondations prennent naissance à partir de Jouarre : le prieuré de Flée (Sarthe) en 1946 et l’abbaye de Regina Laudis (USA) en 1948. Les liens entre monastères de moniales s’intensifient et aboutissent en 1953 à la création de la Fédération du Cœur Immaculé de Marie, un groupement de monastères de France et d’Afrique (Côte d’Ivoire et Guinée).

Mère Aguilberte de Suremain fait évoluer la communauté après le Concile Vatican II qui touche tous les domaines de la vie monastique. Le renouveau liturgique entraîne un nouvel aménagement de l’église, le retrait des grilles et l’introduction progressive du français dans la liturgie. L’aménagement des hôtelleries permet un accueil spirituel plus diversifié et un groupe d’Oblats séculiers est crée.

C’est un temps d’échanges et l’abbaye participe aux organismes post-conciliaires tels que l’AIM, Alliance Inter Monastères, pour la croissance et le développement de la vie monastique partout dans le monde, le DIM, Dialogue Interreligieux Monastique, rencontre avec le monachisme non chrétien, l’ATC, Aide au Travail des Cloîtres, association pour l’aide et la vente de produits fabriqués par les monastères. Au niveau du patrimoine, l’association des Amis de l’Abbaye est créée en 1950 pour aider à l’entretien et à la restauration des bâtiments anciens. En 1991, un cloître est construit, remplaçant celui qui avait disparu à la Révolution.

La communauté poursuit son chemin dans la même grande aventure de foi et d’espérance à la suite du Christ afin d’être, en église, témoin de son amour. »

(Source : Abbaye Notre-Dame de Jouarre)

Site à consulter

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